HCL - IBM : un rachat de logiciels qui soulève bien des questions. En sortirez-vous gagnant ?
L’annonce a fait grand bruit ! Pas moins de 7 gammes de produits logiciels IBM ont été acquises par HCL (Groupe Nova) au cours de l’année 2019 :
- AppScan,
- BigFix,
- Unica,
- Commerce,
- Portal,
- Notes,
- Domino and Connection
Domino Enterprise, Domino Utility, Campaign, Smartcloud notes … C’est en tout plus de 7 000 « part numbers » qui sont concernés (retrouvez la liste complète).
Elée dresse les enjeux majeurs de ce rachat pour aider à adopter la meilleure stratégie.
En fin 2018, IBM avait été sous le feu des projecteurs en dépensant un montant historique (34 Mds de dollars) pour racheter le champion de l’open-source Red Hat. Dans la foulée, IBM a une fois de plus surpris avec une opération financière cette fois-ci plus modeste en cédant de célèbres logiciels à HCL pour un montant de 1,8 milliard de dollars, soit deux fois moins que le montant dépensé en 1995 par IBM pour racheter Lotus Development Corp.
Alors que la transaction financière a été finalisée en juin 2019, Software Asset Managers (SAM), Acheteurs et Vendor Managers glanent les informations ici et là pour être préparés aux conséquences du transfert de responsabilité contractuelle entre les deux éditeurs pour les produits concernés.
Place à la négociation
Construire une nouvelle relation avec HCL : opportunité ou menace ?
La marge de manœuvre peut être importante. En effet l’éditeur cherchera à rentabiliser l’investissement qu’il vient de faire et à promouvoir de nouveaux produits à plus ou moins court terme. Il convient donc de prendre le temps de réunir tous les acteurs (achats, juristes, SAM, équipes métiers…) autour de la table en amont des négociations afin de comprendre « l’offre de valeur » avant de s’engager auprès d’HCL.
- Les produits et la stratégie HCL sont alignés avec la stratégie IT de l’entreprise :
De par le montant engagé, HCL est naturellement à la recherche de rentabilité et de fidélisation de ses clients avec en toile de fond l’objectif de redorer le blason des produits « old-fashioned » d’IBM.
En ce sens, plusieurs leviers de négociation s’offrent donc aux clients pour challenger les prix ou acquérir d’autres produits de la gamme HCL :
1. L’entrée de l’éditeur dans le panel fournisseur de l’entreprise
2. La part de marge commerciale appliquée par HCL vis-à-vis de celle d’un revendeur
2. HCL ne précise pas s’il appliquera un niveau SVP, comme IBM. Même si HCL se targue d’une compétitivité au niveau des prix, il faut s’assurer qu’ils sont en accord avec le niveau SVP de l’entreprise, à la fois sur le prix de la licence et sur le prix de la maintenance.
4. Maintenir ou améliorer les clauses contractuelles avantageuses présentes dans le contrat IBM de l’entreprise
5. Décortiquer les clauses du contrat HCL
- Les produits et la stratégie HCL ne sont pas en phase avec la stratégie IT de l’entreprise :
Si les déploiements actuels de l’entreprise revendus à HCL sont maîtrisés et qu’une montée de version n’est pas requise, il sera possible d’envisager la gestion de ces produits anciennement IBM en passant par une société dont la tierce maintenance est le cœur de métier. La tierce maintenance permettra de bénéficier de prix compétitifs si une montée de version n’est pas nécessaire (Origina, Atos …).
Il faut cependant garder à l’esprit que la non-contractualisation avec HCL entraînera la conservation des règles de licencing et des métriques IBM acquises sans pouvoir calculer votre position de conformité sous le nouveau modèle de licensing HCL.
Vers un nouveau license model
Le discours marketing d’HCL s’articule autour de 3 maîtres-mots tirés du constat de la complexité des règles de licences IBM : simplicité, transparence et compétitivité.
Lors d’une présentation publique de la nouvelle version de Domino v11, l’éditeur propose deux options de licensing pour sortir de la métrique cumulative PVU+CAL classique. Néanmoins, si vous êtes actuellement détenteur de ces produits, il sera possible de continuer de renouveler les licences existantes sur de nouvelles références HCL, selon les mêmes conditions contractualisées avec IBM. HCL attend d’avoir des retours d’expériences solides avant d’imposer ce nouveau modèle.
- Licence basée sur l’utilisateur
L’achat d’une licence sera nécessaire pour chaque utilisateur. Le nombre d’utilisateurs sera monitoré par le système Flexnet. Il n'y a aucune limitation sur l'utilisation du serveur ou l'utilisation du processeur. HCL propose deux types de concession : par souscription mensuelle ou par licence perpétuelle.
Il convient alors de se poser les interrogations suivantes pour déterminer si ce changement de métrique sera plus avantageux ou non :
- La définition que donnera HCL d’un Utilisateur (interne, externe, concurrent, nommé, …)
- Le nombre d’utilisateurs
- La variabilité du nombre d’utilisateurs
- Le temps considéré pour transférer des licences entre utilisateurs
- L’intérêt d’une licence perpétuelle ou d’une souscription
- Server only license
HCL inverse ici la logique en octroyant une licence à un serveur en fonction de son utilisation. Le nombre d’utilisateurs devient illimité. La méthode de calcul semble être basée sur le NSF (Notes Storage Format), mais à date elle n’a pas été explicitée par l’éditeur. Le prix unitaire de la licence serait basé sur des niveaux.
La confusion risque de s’amplifier dans la gestion des déploiements pour être conforme aux achats effectués en cette période de transition. Les clients doivent rester vigilants car dans le même temps, chaque éditeur va devoir défendre son bilan financier. Cette situation crée des opportunités d’audit profitables pour chacun des éditeurs.
Vigilance sur l’audit
Il est fréquent que les audits logiciels IBM augmentent de manière significative lorsque que les produits concernés sont cédés. C’est le moment de relire le contrat de l’entreprise ! Bien que la vente de ces produits ait été conclue en fin 2019, une clause contractuelle standard présente dans le Passport Advantage stipule qu’un audit peut être déclenché deux ans après la fin du contrat.
Sortir les produits vendus par HCL du scope d’un audit IBM peut être envisagée par le biais d’une négociation. Avant toute chose, il faut vérifier que tous les droits sont transférés vers le nouveau contrat HCL et que les périodes de couverture de renouvellement ont correctement été transférées à partir de votre précédent contrat IBM.
Ces produits sont désormais régis sous le nouveau contrat HCL Master License Agreement (MLA). Ce contrat contient une clause d’audit (alinéa 12). HCL s’y autorise le droit d’auditer un client une fois par an, de faire appel à un tiers, et comme pour IBM, fait perdurer son droit d’audit 2 ans après la fin du contrat ou d’une commande. Toute la question est désormais de savoir si HCL va tout miser sur lancement d’un programme d'audit des logiciels acquis, afin d'optimiser leurs revenus 2020 pour rentabiliser leur achat.
Perplexité autour d’ILMT
Dans sa communication à travers une FAQ, IBM assure que :
- ILMT reste un produit IBM
- ILMT reste gratuit
- ILMT conserve ses règles de suivi obligatoires pour l’éligibilité au Sub Capacity
- ILMT continue de reposer sur BigFix
En juin 2019 les deux éditeurs ont conclu un accord pour que BigFix Inventory continue d’alimenter ILMT. La nouvelle version de BigFix 9.2.16 a dans ce sens été validée par IBM en septembre 2019.
Désormais la maintenance et le support d’ILMT continuent d’être régis par IBM, l’update des catalogues, condition indispensable à l’éligibilité du Sub Capacity est régi par HCL. A la complexité de gestion de l’outil ILMT va donc s’ajouter la difficulté de faire coexister BigFix et ILMT en surveillant à la fois l’actualité des mises à jour de HCL et celle d’IBM.
A retenir – Transition HCL / IBM
- Prendre le temps de définir la stratégie contractuelle
- Comprendre et choisir la meilleure option de licensing
- Être préparé à l’audit
- Réorganiser sa routine de travail sur ILMT